En 1995, le bois-énergie a fourni 95% des énergies consommées
dans le secteur résidentiel, 88% dans le secteur commerce et services
et 10% dans le secteur industriel. Mis à part la période
d’embargo il est certain qu’en termes relatifs, la consommation du bois
de feu a diminué de 15% au cours des années 80. Ceci est
dû à une augmentation notable de l’utilisation des combustibles
fossiles importés et des restrictions que les consommateurs s’imposent
à cause du phénomène de monétarisation du bois-énergie
qui prend de plus en plus d’ampleur partout à travers le pays. Mais
en termes absolu la consommation de bois de feu a augmenté
Les prélèvements annuels de bois de feu dépassent
la capacité de régénération naturelle des arbres
ce qui entraine un déficit manifesté par une diminution progressive
du couvert végétal qui de 60% en 1923 est passé à
18% en 1952 et à 1.44% en 1989. (Source ECMU/PNUD 1996)
Malgré l’existence d’une abondante législation dans le
domaine de la protection des ressources forestières et de l’environnement,
la politique officielle de l’Etat en matière de gestion des ressources
ligneuses n’est pas bien tracée. De nombreux efforts ont été
déployés, surtout par les institutions internationales et
les organismes non gouvernementales, pour contrecarrer cette tendance catastrophique,
cependant, l’absence d’un guide officiel en la matière a rendu ces
efforts infructueux, voire totalement inopérant dans certains cas.
L’échec constaté dans le domaine de la réhabilitation
de l’environnement doit être recherché dans la culture haïtienne
elle-même. On déboise par ignorance, on déboise pour
la production d’énergie, on déboise pour augmenter l’espace
agricole, on déboise pour la construction, on déboise enfin
pour des raisons militaires et politiques.
La production du charbon de bois et secteurs
concernés
En Haïti, la production du charbon de
bois est une activité de la plus haute importance. Ce combustible
est, avec le bois sous sa forme naturelle, le plus utilisé par le
peuple haïtien dans les zones urbaines pour les besoins domestiques
tels: la cuisson des aliments, le repassage et le blanchissage du linge.
La consommation du charbon de bois est estimée entre
250 et 280 mille tonnes chaque année, ce qui crée autour
du charbon de bois une grande activité commerciale. Environ 150.000
personnes participent aux activités de production et de commercialisation
du charbon de bois générant ainsi un revenu compris entre
50 et 75 millions de dollars américains chaque année. Environ
30% du revenu du charbon de bois est redistribué dans le milieu
rural. La production et la vente du charbon de bois font épargner
au pays entre 14 et 17 million de dollars américains chaque année
au cas où le gaz de pétrole liquéfié devait
être importé comme substitut au charbon de bois pour les besoins
domestiques.
La production du charbon de bois est, dans la majorité
des cas, une activité temporaire dépendant des conditions
écologiques des différentes régions du pays. Les zones
à faible pluviosité ont tendance à produire davantage
que les régions où le régime des pluies favorise des
activités agricoles diversifiées. On constate de nos jours
que le facteur prix influence aussi la production. Les régions du
Sud-Ouest et de la Grande Anse sont en train de devenir les zones les plus
productrices de charbon de bois au détriment du Nord’Ouest qui a
toujours été considéré comme la grande pourvoyeuse
du charbon de bois du pays. Aujourd’hui, l’existence même de cette
matière première exploitée anarchiquement est menacée.
Les arbres sont abattus sans discernement et les espaces boisées
disparaissent à un rythme déconcertant.
Plus de 70% du total de charbon de bois produit à travers le
pays est acheminé dans la région métropolitaine de
Port-au-Prince, le reste est absorbé par les provinces. Ce combustible
répond donc au besoin de 26% de la population totale du pays. Les
ménages consomment plus de 80% de la production totale du charbon
de bois, le reste est consommé par les restaurants surtout du secteur
informel (restaurants de rues). Au sein du secteur résidentiel lui-même
le charbon de bois satisfait 92% du total des combustibles utilisés,
la différence est comblée par les produits pétroliers,
principalement le Gaz de pétrole Liquéfié (LPG).
Les centaines de milliers de tonnes de charbon de bois consommés
annuellement dans les zones urbaines haïtiennes ont des répercussions
beaucoup plus importantes sur l’écologie que les millions de tonnes
de bois de feu consommés par les ruraux. Le charbon de bois est
fabriqué à partir de bois vivant coupé pour la circonstance
et les rendements à l’utilisation du charbon de bois dans les réchauds
traditionnels (20% d’efficacité en moyenne) sont faibles.
Cette note sombre ne s’étend pas au
travail du charbonnier qui de tout temps a fait montre d’une certaine rationalité
dans son travail. "C’est le charbonnier pauvre, qui décide:
a) de la localisation et de l’extension des aires de production; b)
des techniques de prélèvement du matériel ligneux;
c) des méthodes de carbonisation; d) et de l’ajustement
de l’offre à la demande". Il s’agit donc là d’un héritage
culturel relativement bien conservé. (J.
A. Victor, 1996).
Malgré l’importance du charbon de bois
dans la structure énergétique du pays (Haïti étant
toujours à l’âge du bois), principalement dans le bilan énergétique
des ménages, il est malheureux de constater le peu d’intérêt
manifesté par les pouvoirs publics et les élites haïtiennes
à la gestion du secteur charbonnier. "Au charbonnier, l’Etat
ne fournit ni crédit, ni assistance technique et ne donne ni subvention,
ni information. Le seul contact que l’administration publique entretient
avec le charbon et le charbonnier, passe à travers le fisc dont
le système de taxation établi n’arrive à collecter
que 10 % des taxes perceptibles" (J. A. Victor, 1996). Malgré l’existence
d’un monument juridique impressionnant dans le domaine de la protection
des ressources forestières et de l’environnement très peu
d’attention est accordée à la gestion des arbres en relation
avec leur fonction énergétique. On ne connaît que deux
textes légaux traitant de ce problème, la loi d’août
1955 et le décret de 1987, qui reconnaissent tous deux la nécessité
de recourir à des sources d’énergies alternatives pour faire
baisser la pression sur le bois de feu. Cependant, aucune disposition ne
fut prise par l’administration gouvernementale pour le suivi de ces décisions.
Il est par contre impératif de gérer rationnellement cette
importante ressource qui a des retombées sérieuses sur la
production nationale, sur le système économique, le système
social, le bilan énergétique et surtout sur le système
écologique national, voire régional.
Plusieurs solutions ont été proposées
qui tiennent compte de différentes approches, néanmoins la
complexité des facteurs liés à la problématique
du charbon de bois montre qu’en plus d’une politique de substitution bien
structurée il est nécessaire de mettre en place une politique
forestière basée sur la production et l’exploitation des
ressources sur une base renouvelable.
Utilisation des énergies renouvelables
Les énergies renouvelables constituent les sources d’énergies
du futur à cause de deux raisons essentielles: leur disponibilité
indiscriminée, le peu de risques écologiques associé
à leur utilisation ainsi que les avantages économiques associés
à leur exploitation. Il y a lieu de mentionner aussi que les barrières
techniques et économiques qui ont constitué dans le passé
des handicaps sérieux au premier investissement sont de plus en
plus soulevées pour devenir de nos jours dans certains cas (éclairage
et communication) pratiquement inexistantes.
Si l'on exclut le bois-énergie
et les résidus végétaux, les énergies renouvelables
constituent une partie très faible du bilan énergétique
national en terme de pourcentage du total. Cependant étant donné
que la grande quantité d’énergie électrique générée
par une ressource renouvelable dans le pays, en l’occurrence l’énergie
hydro-électrique, il est très difficile de ne pas accorder
à cette source toute l'importance qu'elle mérite. En
effet, les centrales hydroélectriques et éoliennes en opération
permettent d’épargner au pays l’équivalent de 100 millions
de dollars américains chaque année. Les énergies renouvelables
qui seront considérées dans ce chapitre sont l’énergie
solaire et l’énergie éolienne. |
Energie Solaire
L’énergie solaire a toujours été utilisée
en Haïti dans le secteur agricole pour le séchage des récoltes
et dans le secteur domestique pour le séchage du linge. Depuis une
dizaine d’année environ, d’autres applications sont trouvées
à cette abondante source d’énergie. Il s’agit en particulier
de l’exploitation de la filière thermique pour le chauffage de l’eau
et de la filière photovoltaïque pour la production de l’électricité.
En 1993 par exemple, Haïti a importé des Etat-Unis d’Amérique
pour plus de 20 Kilowatt de modules et cellules photovoltaïques. Cependant
l’énergie solaire photovoltaïque reste encore un produit de
luxe utilisé par les classes aisées comme matériel
d’appoint pour suppléer aux coupures d’électricité
dans la zone métropolitaine. Un certain nombre d’installations photovoltaïques
a été réalisé, avec l’assistance d’organisations
internationales, dans les zones rurales en vue de fournir des services
de santé aux populations défavorisées.
Energie Eolienne
L’énergie éolienne a toujours été utilisée
en Haïti pour la navigation (cabotage et pêche). Quelques pompes
éoliennes ont été installées dans les principles
plaines du pays, cependant, elles n’ont pas eu le succès escompté.
L’Ed’H a expérimenté en 1991 avec la coopération
de la République Fédérale d’Allemagne un parc éolien
d’une puissance de 150 Kw (cinq unités de 30 Kw chacune) dans la
région de Port-de-Paix (Nord’Ouest). Ces aérogénérateurs
qui ont fonctionné pendant quelques années ont été
retiré du réseau à cause de problèmes d’entretien.
Le potentiel éolien d’Haïti est surtout concentré
dans le Nord’Ouest principalement sur le versant nord de l’île de
la Tortue où les vents ont une vitesse moyenne de 5-7 mètres
par seconde, ce qui est très intéressant pour des applications
telles l’exploitation d’aérogénérateurs (production
de courant électrique) et le pompage d’eau souterraine. Néanmoins,
les choix technologiques sont importants dans chacun des cas.
Potentiel Bioénergétique
On trouve en Haïti de nombreux déchets végétaux
provenant du café, du coton, des cultures céréalières
et de l’extraction des huiles essentielles. Du point de vue énergétique
ces déchets sont utilisables, cependant étant donné
leur grande dispersion il est très difficile de les utiliser à
l’endroit où ils sont générés. De plus la spécificité
propre à chacun de ces déchets fait appel à des techniques
spéciales pour chacun d’eux. Les déchets de ferme (fiantes
de poulets, bouse de vache, de porcs, de cabrits, des équidés,
etc… ) ainsi que les déchets de ville peuvent facilement être
convertis en biogaz prêt à l’usage. Cependant, le problème
de collecte doit d’abord être maîtrisé principalement
pour les déchets de ville et dans le cas de l’élevage libre.
Utilisation de la bagasse et potentiel
Avec la disparition des centrales sucrières modernes la consommation
de la bagasse a beaucoup baissé en Haïti. Cependant, le potentiel
de cette ressource énergétique locale, reste très
élevé. Il a été estimé qu’une quantité
de bagasse égale à 140.000 tonnes est disponible chaque année
au niveau des moulins et guildives qui ne consomment que 15% de la quantité
de bagasse produite. Les petits moulins produisant le sirop consomment
uniquement la bagasse tandis que les mini-distilleries ou guildives, qui
produisent de "l’alcool agricole" ou clairin à partir du sirop,
consomment (à l’exception de quelques unes) le bois de feu comme
combustible. Le potentiel énergétique de la bagasse produite
dans les distilleries en Haïti oscille entre 37 et 56 mille tonnes
équivalent en pétrole (TEP).
Production et utilisation de l’énergie électrique en Haïti
La première génératrice a été introduite
en Haiti à Jacmel en 1895, elle pouvait fournir 1270 kW de puissance.
Ce n’est qu’en 1910 sous la présidence d 'Antoine Simon que la ville
de Port-au-Prince a commencé à jouir des bienfaits de l’électricité.
L'activité de production d'énergie électrique a été
assurée par des compagnies privées jusqu'à sa prise
en charge par l'Etat Haïtien lors de la mise en service de la centrale
hydro-électrique de Péligre en 1971 et la création
de l'organisme autonome dénommé Electricité d’Haïti.
L’électricité est générée
à partir de deux sources principales, les usines hydroélectriques
et les usines thermiques. En 1995, les capacités installées
de ces usines totalisent respectivement 54.8 et159.0 MW. On retrouve dans
les provinces 14.2% de la capacité hydroélectrique et 22.55%
de la capacité thermique installée. Ces proportions sont
encore plus marquées au niveau de la génération électrique
où seulement 10 à 15% de l’électricité produite
est distribuée en province. La capacité installée
électrique permet de générer jusqu’à 560 GWH
d’électricité au cours d’une année ce qui équivaut
à une consommation annuelle per capita de 80 kWh soit seulement
15% de celle de la République Dominicaine pour l’année 1994.
Au cours des années 1970 les ventes d’électricité
ont augmenté à un rythme de 16.1% par année tandis
qu’au cours de la décennie 1980 elles n’ont été que
de 5.25% par année. La croissance de la demande d’électricité
a suivi celle du PIB mais à un taux plus élevé. Entre
1972 et 1989 la consommation d’électricité per capita est
passée de 12 KWH à 54 KWH soit une croissance de 8.7% par
année. Le taux d’électrification est passé de 3% à
10% pour la même période, parallèlement, le nombre
d’abonnés est passé de 24 mille à 112 mille. Malgré
ces efforts les paramètres du secteur électrique haïtien
sont parmi les plus bas de la région Caraíbe.
A partir de 1989, la production et la vente d’électricité
sont entrées dans une période décroissante due au
déclin des activités économiques, au niveau très
élevé des pertes non techniques et à l’absence d’entretien
des équipements de production ainsi qu’à l’absence d’investissements
pour l’agrandissement du parc d’équipements.
L’énergie électrique est générée
par une capacité installée qui est passée de 43.0
MW en 1971 à 242.1 MW en 1995 soit une croissance de 5.6 fois. Sa
composition est passée de 72% hydro et 28% thermique en 1971 à
27.55% hydro et 72.5% thermique en 1995. L’électricité générée
est répartie entre les cinq (5) principaux secteurs selon des proportions
qui varient avec les années. L’analyse du tableau V qui suit révèle
les grandes tendances observées depuis 1971.
TABLEAU V
|
1971
MW % |
1975
MW % |
1980
MW % |
1985
MW % |
1990
MW % |
1995
MW % |
Ventes Totales
Résidences
Industries
Commerce
Gouvernement
Eclairage Public |
58.5 100.0
19.9 34.0
17.9 30.6
12.9 22.0
5.1 8.7
2.7 4.7 |
99.5 100.0
31.8 32.0
45.3 45.5
9.9 10.0
6.5 6.5
6.0 6.0 |
197.1 100.0
69.5 35.3
100.6 51.0
10.7 5.4
9.2 4.7
7.1 3.6 |
296.5 100.0
123.0 41.5
137.0 46.2
- -
28.2 9.5
8.2 2.8 |
331.9 100.0
154.6 46.6
117.0 35.3
13.2 4.0
35.4 10.6
11.7 3.5 |
211.3 100.0
100.3 47.5
68.5 32.5
8.0 3.8
23.8 11.4
10.1 4.8 |
Source: Electricité d’Haïti (Ed’H)
A cause du déclin des activités industrielles au cours
des années 80 le secteur résidences et services devient au
cours des années 90 le plus gros consommateur de l’électricité
produite avec 47.5% du total, tandis que la consommation du secteur industriel
continue à diminuer après un maximum de 51% atteint au cours
de l’année 1980.
Les performances d’exploitation du secteur électrique sont pauvres.
Elles se manifestent par le niveu élevé des pertes qui ont
atteint jusqu’à 57% en 1995 (tableau VII et VIII), la faible productivité
par employé, le cumul des déficits financiers et le tarif
élevé appliqué aux consommateurs.
L’Electricité d’Haïti dépend largement de l’aide
étrangère pour les investissements à consentir dans
l’acquisition des équipements et dans la formation du personnel
technique. Ce qui range le secteur électrique parmi les secteurs
principaux consommateurs de l’aide publique au développement en
Haïti. Le secteur électrique éetait responsable en 1987
de 18% de la dette totale du pays envers les bailleurs de fonds internationaux.
L’hydroénergie, Utilisation et Potentiel
La production électrique à partir des ressources hydrauliques
a commencé depuis 1971 après l’entrée en service de
la Centrale Hydro-électrique de Péligre d’une capacité
installée de 47.1 MW. Cette Centrale produit ordinairement entre
220 à 320 GWh suivant la variabilité des apports annuels
du fleuve Artibonite. Par la suite l’ED’H a élaboré et éxécuté
un programme de développement de minicentrales totalisant 7.8 MW
réparties sur sept (7) sites, tous situés en province. Il
s’agit de petites centrales dont la puissance installée varie entre
0,30 et 2,25 MW.(Voir tableau VI pour détails)
TABLEAU VI. HAÏTI: POTENTIEL HYDROÉLECTRIQUE
DÉVELOPPÉ
Rivières ou Sources
|
Site Développé
|
Hauteur de Chute (en mètres)
|
Puissance Installée
(en MW)
|
Type de Turbine
et Date
|
Artibonite
Artibonite
Cavaillon
Cayes-Jacmel
Onde Verde
Caracol
Délugé
Petite-Rivière |
Péligre
Drouet
Saut Mathurine
Gaillard
Belladère
Caracol
Délugé-Lanzac
Milot |
12.0
9.0
110.0
210.0
16.5
160.0
298.0
111.0
|
47.1
2.8
2.4
0.5
0.3
0.85
0.8
0.13
|
Francis (1971)
Ossberger (1978)
Pelton (1983)
Pelton (1985)
Ossberger (1983)
Pelton (1985)
Pelton (1991) |
Source: Electricité d’Haïti (ED’H)
Ce potentiel hydroélectrique développé a rendu
un service important à la communauté haïtienne à
mesure de sa mise en service principalement dans les moments difficiles
où l’ED’H se trouve confronté à des problèmes
d’approvisionnement en combustibles pétroliers.
En 1973 l’énergie hydroélectrique a permis de produire
plus 94% de l’offre en
énergie électrique du pays. Au cours des ans la proportion
a baissé jusqu’à atteindre de nos jours 40% de l’offre. Les
prévisions pour les prochaines années accusent cette tendance
à la baisse.
On évalue à 153.58 MW le potentiel énergétique
total des sites hydroélectriques non développés en
Haïti. De ce total 85% (soit 130.7 MW) sont constitués par
4 grosses centrales allant de 22 à 45 MW et le reste 15% (soit 22.58
MW) sont constitués de 27 petites centrales allant de 0.10 à
2.57 MW avec des hauteurs de chute variant de 2.1 à 111.0 mètres.
Ce sont donc des mini et micro centrales capables d’utiliser les deux types
principaux de turbines les plus utilisés à travers le monde:
les turbines à réaction et les turbines à action.
LES RESSOURCES ÉNERGÉTIQUES IMPORTÉES
Expérience de l’utilisation du charbon minéral
en Haïti
Le charbon minéral a été
introduit dans le bilan énergétique national pour la première
fois en 1982. Au cours de la période 82-90, où ce combustible
a été importé par l’unique Cimenterie du pays, la
consommation a varié de façon notable 12.222 à 47.061
tonnes. On a même constaté deux (2) années au cours
desquelles aucune importation n’a été effectuée. Ce
comportement peut être expliqué par les facteurs suivants:
le caractère mixte des installations de
chauffage du clinker (charbon minéral et mazout) disponibles à
la Cimenterie:
la baisse des prix des produits pétroliers
enregistrée sur le marché mondial au cours des exercices
85-86 et 86-87.
les mesures de politique interne liées
à le pénurie de devises pour l’importation de combustibles
autres que les produits pétroliers alors qu’un surplus de mazout
est dégagé sur le marché interne à cause de
la réduction dans le demande de l’ED’H occasionnée par la
disponibilité de l’eau au niveau des barrages.
Le marché des Produits Pétroliers, Contraintes
et Perspectives
Haïti importe toute la quantité de produits pétroliers
qu’elle consomme sous forme de produits distillés. Sa consommation
annuelle (en tenant compte des quinze dernières années) varie
de 1.6 à 2.6 millions de barils ce qui constitue entre 13 et 20%
de l’offre totale en énergie du pays (graphique 1).
Malgré ce faible espace occupé dans le bilan énergétique
national, les produits pétroliers constituent un fardeau très
lourd pour l’économie nationale. Ce pays consacre entre 30 et 50%
de ses recettes d’exportation pour l’importation annuelle de cette ressource
énergétique, ce qui équivaut à des montants
allant de 150 à 420 millions de gourdes pour la période considérée.
En 1990, les importations de produits pétroliers (345 millions de
gourdes) ont représenté 51% des recettes d'exportation et
plus de 25% du total des importations (graphique 3). Malgré tout,
la quantité de produits pétroliers utilisée est faible
comparée à celle consommée par les autres pays de
la Caraïbe et de l'Amérique Centrale à niveau démographique
équivalent.
Au cours des vingt (25) dernières années
(1970-1995), la demande de produits pétroliers a accusé une
croissance en dents de scie, elle a même été négative
en 1972, 1980,1982 et entre 1986 et 1989. Ce modèle de croissance
peut être attribué aux variations enregistrées au niveau
des combustibles non destinés au transport, tels le mazout, le kérosène
et l'asphalte. Par contre, ceux destinés au transport paraissent
suivre un modèle de croissance plus soutenu. Par exemple, la soudaine
réduction de l'importation du mazout vers les années 83-84
était due à deux facteurs : l'arrêt des activités
d'extraction minière de la Reynolds Haitian Mines et le passage
du Ciment d'Haiti à une nouvelle source d'énergie, le charbon
minéral pour la cuisson du clinker. D'autre part, le déficit
en eau enregistrée au niveau du Lac de Péligre au cours des
exercices 83-84, 86-87 et surtout 89-90 a provoqué une hausse considérable
de la consommation du mazout (graphique 2)
De même, la seule hausse notoire dans
la consommation de l'asphalte n'a été enregistrée
qu'au cours des années 76-78, coïncidant justement avec la
construction des réseaux routiers du nord et du sud. On observe
par la suite un net déclin dans la consommation de ce produit.
La gazoline et le diesel utilisés dans
le transport, représentent plus de la moitié du total des
combustibles pétroliers importés par année, ce qui
prouve que le transport de passagers, surtout dans la région métropolitaine
de Port-au-Prince, constitue une activité économique importante
qu'il convient de prendre très au sérieux.
La pénétration du Gaz de Pétrole
Liquéfié (GPL) sur le marché haïtien (type propane)
a été plus difficile à cause de contraintes économiques
liées à son utilisation. Sa consommation est passée
de 1116.0 tonnes en 1970 à 4120.0 tonnes en 1988. Ce n’est qu’avec
l’apparition du butane en 1989 que des augmentations substantielles sont
enregistrées annuellement. Les années d’embargo ont fait
baisser la consommation et malgré une certaine reprise à
partir de l’année 1994 la demande n’a pas encore atteint le niveau
record de 1990 qui était de 7731.0 tonnes.
Dans la composition de la chaine d’approvisionnement et de distribution
des produits pétroliers on retrouve l’Etat Haïtien, les Compagnies
pétrolières privées, les distributeurs, et enfin les
consommateurs. Les compagnies pétrolières ont toujours joué
un rôle primordial dans les décisions relatives aux transactions
des produits pétroliers aussi bien en ce qui concerne les conditions
d’approvisionnement, du transport, de la distribution de ces produits que
dans la formation des prix des combustibles à partir des marges
qu’elles obtiennent tout au long de la chaîne.
Les distributeurs dépendent pour beaucoup des compagnies tant
du point de vue du contrôle technique que celles-ci exercent, que
par les contrats de gestion des stations de service qui relient les deux
parties.
Le stockage et la distribution des produits pétroliers est assuré
par les compagnies concessionnaires qui opèrent comme distributeurs-grossistes,
semi-grossistes et dans le cas de la Sodigaz comme petit détaillant.
Les facilités de stockage actuellement en service sont localisées
uniquement dans la zone métropolitaine. Elles totalisent 1.246.000
barils barils. Les entreprises d’Etat disposent d’une
capacité de l’ordre de 84.000 barils (Miragoâne pour la la
Reynolds et Gonaïves pour la Sedren non inclus).
Les produits pétroliers (essence, kérosène, gasoil,
lubrifiants) sont distribués aux consommateurs à travers
plus de 110 stations de service dont 70% se trouvent dans la zone métropolitaine.
Le transport des produits à l'intérieur du pays est assuré
par voie terrestre, soit par des camions citernes appartenant aux compagnies
sus-citées, soit par des contractants indépendants. Par ailleurs,
un volume important de produits, notamment du kérosène et
du gasoil est charrié en drums de la capitale vers la province à
bord de véhicules publics transportant des passagers et d'autres
marchandises. En dehors de ce circuit formel, on retrouve les lubrifiants
ici et là dans les "Auto Parts" et même sur les trottoirs.
Le LPG est distribué aux consommateurs par bonbonnes de 7, 10,
20, 50 et 100 livres et également en bulk à des utilisateurs
disposant des bouteilles de 500 livres et plus. Les bonbonnes de 7 livres
sont offertes exclusivement par la Sodigaz. Les achats de 25 livres au
moins se font soit au comptoir des compagnies Tropigas et Haiti Gas, soit
dans les Super marchés soit encore chez certains agents de distribution
spécialisés. Les compagnies assurent la livraison à
domicile à partir de 100 livres.
La gestion des produits pétroliers est assurée par les
compagnies pétrolières qui agissent "avec pleine liberté
sur le marché interne contrôlant toute la chaîne depuis
l’approvisionnement à l’extérieur jusqu’à la distribution".
Le commerce des produits pétroliers est assujetti à la loi
de 1949 dont certaines dispositions sont complètement dépassées
étant donné l’évolution des techniques liées
au commerce de ces produits.
Malgré l’expérience malheureusement trop courte de l’Accord
de San José (1990-1991), il n’y a eu jusqu’à présent
aucune politique d’approvisionnement née de politique des prix qui
ferait partie d’une politique énergétique globale en accord
avec la politique économique et sociale du gouvernement visant le
moyen et le long terme. Dans le domaine économique, la résolution
des problèmes de conjoncture a prévalu sur la planification
à un horizon de temps qui dépasse l’immédiat. A chaque
fois que l’Etat intervient dans la formation des prix, il est toujours
guidé par des préoccupations budgétaires et/ou des
problèmes de stabilisation des prix à la consommation (Guzman
and all, 1991). Ce n’est jamais pour résoudre un problème
environnemental ou de développement économique lié
à ces combustibles. Certaines décisions d’approvisionnement
ont même été préjudiciables à l’environnement.
La politique pétrolière du gouvernement doit tenir compte
des préoccupations environnementales et sociales auxquelles le pays
fait face actuellement.
LES MÉCANISMES DE GESTION
DU SYSTÈME ÉNERGÉTIQUE HAÏTIEN.
A l’examen on constate que la structure administrative énergétique
d’Haïti est dans la majorité des cas privée en considérant
le poids occupé par les ressources ligneuses et les produits pétroliers
dans le bilan énergétique national. L’Electricité
d’Haïti, malgré tous ses déboires reste un organisme
autonome de l’Etat; sa gestion administrative ne devrait pas être
influencée par les décisions gouvernementales.
Gestion des ressources ligneuses
La production du bois de feu et du charbon de bois, constitue la plus
grande source d’énergie utilisée dans le pays, son transport
du lieu de production aux principaux centres de distribution, et sa commercialisation
sont organisés selon un circuit informel obéissant aux règles
du marché libre. L’intervention de l’Etat autrefois confinée
au contrôle des prélèvements dans les réserves
naturelles et dans les "terres dites de l’Etat", et à l’application
d’une taxe sur les cargaisons de charbon de bois à des postes de
controle pré-établis, est de nos jours tout à fait
inexistante. On peut dire qu’en général l’Etat ne tire aucun
revenu direct sur les 3.400.000 Tonnes de bois de feu récoltées
chaque année en Haïti et dont 250.000 à 300.000 Tonnes
de charbon de bois sont produites, ce qui représente environ 37%
du total de bois de feu collecté. L’activité commerciale
la plus importante est réalisée avec le charbon de bois et
non avec le bois de feu malgré que ce dernier compte un tonnage
beaucoup plus important.
La nécessité de gérer rationnellement les ressources
forestières du pays est apparue pour la première fois dans
la loi d’Août 1955. Entre autres préoccupations cette loi
prévoyait "la nécessité de recourir à des
énergies alternatives pour faire baisser la pression sur le bois
de feu". Un deuxième décret daté de 1987 accorda
un délai de six (6) mois aux petites entreprises industrielles et
commerciales utilisant le bois de feu pour transformer "leur système
de brûleur afin de pouvoir utiliser d’autres combustibles que le
bois". Il y a dans ces deux textes légaux distants de trente-deux
(32) ans, une tentative de gestion rationnelle de la biomasse utilisée
à des fins énergétiques. Malheureusement, aucune disposition
ne fut prise par l’administration gouvernementale pour le suivi de ces
décisions. C’est un exemple typique de décisions justes mais
non planifiées, donc vouées à l’échec.
Gestion du secteur électrique
La gestion du secteur électrique est assurée entièrement
par l’Etat, qu’il s’agisse de la production, du transport, et de la commercialisation.
L’Electricité d’Haïti, un organisme public national à
caractère industriel et commercial a la responsabilité exclusive
des opérations de production de transport, de distribution et de
commercialisation de l’énergie électrique à travers
le territoire. Il a récemment décidé de partager avec
le secteur privé ses droits de production (décret du 20 août
1989, modifiant celui du 9 avril 1977), cependant, il demeure le seul acquéreur
de l’énergie électrique produite.
Les ressources hydrauliques utilisées pour produire l’hydroélectricité
sont gérées conjointement avec les autorités régionales
au niveau planification. L’Ed’H demeure néanmoins le seul responsable
des opérations quotidiennes de l’eau accumulée derrière
les barrages hydro-élecriques dont il a la gestion.
Gestion des produits pétroliers
La gestion des produits pétroliers est laissée à
la discrétion des compagnies pétrolières qui agissent
"avec pleine liberté sur le marché interne contrôlant
toute la chaîne depuis l’approvisionnement à l’extérieur
jusqu’à la distribution". L’Etat par l’intermédiaire
du Ministre du Commerce et de l’Industrie, joue seulement un rôle
d’arbitre dans l’attribution des contrats mensuels d’importation par appel
d’offres et dans l’établissement de la structure des prix des différents
produits. La loi qui réglemente le commerce des produits pétroliers
en Haïti date de 1949. Cette loi est complètement dépassée
étant donné l’évolution des techniques liées
au commerce de ces produits.
Les Institutions
Les institutions s’occupant de questions énergétiques
en Haïti sont au nombre de cinq (5) et dépendent de trois Ministères
(voir Tableau 5). Aucune d’entre elles cependant, n’a pour tâche
la planification globale du secteur, ce qui explique l’absence d’une politique
énergétique nationale visant la diminution de la pression
sur les ressources ligneuses nationales, la plus grande source d’énergie
du pays. A cause des implications de la structure énergétique
sur l’environnement, le Ministère de l’Environnement (créé
en 1994) dont la tâche principale est l’établissement des
lois et normes visant la réhabilitation de l’environnement, a décidé
dans le cadre de ses attributions de mettre au point le cadre réglementaire
ainsi que les mécanismes appropriés à travers le Plan
d’Actions pour l’Environnement élaboré de telle sorte à
permettre que les institutions soient à même de discuter des
actions communes.
Tableau 7. Rôle des institutions travaillant dans le secteur
énergétique en Haïti
Institutions
|
Secteurs
|
Electricité |
Produits pétroliers
|
Bois-énergie
|
Autres ressources locales
|
MTPTC
ED’H
BME
|
Planification, Production, Distribution et Vente |
|
Promotion de Technique Rationelle d’Utilisation |
Exploitation Recherche et Développement |
MCI
BAPP
|
|
Controle Prix, Accords, d’Approvisionnement |
|
|
MARNDR
SF
CRDA
|
|
|
Promotion et Controle de la Production Recherche/Développement |
Vulgarisation |
MDE
PAE
|
|
|
Gestion Parcs et Aires réservées;
Diminution pression sur bois-énergie |
|
SECTEUR PRIVÉ |
|
Importation Distribution et Vente |
|
|
ONG |
|
|
Production/Distribution de Plantules |
Vulgarisation |
LES CARACTÉRISTIQUES DU SYSTÈME ENERGÉTIQUE
HAITIEN
Les traits caractéristiques généraux observés
dans le système énergétique haïtien sont les
conséquences de la situation de sous développement qui caractérise
le pays. On y retrouve les phénomènes de dépendance
par rapport à l’extérieur, de désarticulation
par rapport à la situation locale, tant du coté de l’aprovisionnement
que des usages, d’inadéquation aux besoins fondamentaux
et d’agression sur le milieu naturel.
On constate en Haïti que les sous-systèmes pétroliers,
électrique et bois de feu ont évolué de façon
autonome sans stratégie et politique énergétique d’ensemble,
ce qui a donné lieu à bien des incohérences et des
pertes d’efficacité. De même, très peu de cas a été
fait des avantages qui pourraient découler de l’amélioration
des performances dans l’utilisation des énergies traditionnelles
ainsi que ceux qu’on pourrait obtenir par le recours éventuel aux
énergies nouvelles.
Le résultat des actions dans le domaine énergétique
s’est traduit par une politique de l’offre, ignorant les possibilités
offertes par une action efficace sur la demande grâce à une
politique d’utilisation rationnelle de l’énergie. Et même
dans ce cas les choix ont été laissés aux entreprises
productrices dont la tendance naturelle est d’améliorer l’efficacité
de leur propre sous-système et non celui du système énergétique
dans son ensemble. Des possibilités de substitutions entre diverses
sources n’ont pas été prises en compte, de même certaines
solutions faciles ont été négligées telles
l’adaptation des énergies nouvelles (solaire thermique, solaire
photovoltaique, mini-hydraulique, éolienne, etc..,) aux besoins
de développement de zones marginales et de zones isolées.
CONCLUSIONS
A cause du déficit accumulé depuis plusieurs décennies
et compte tenu de l’état de dégradation de son environnement,
Haïti ne peut plus continuer à utiliser au rythme actuel ses
maigres ressources ligneuses pour satisfaire les besoins énergétiques
des différents secteurs. Des actions basées sur une politique
énergétique cohérente et rationnelle doivent être
menées en vue d’une part, de mettre sur pied un programme dendro-énergétique
avec comme objectif la production du bois-énergie dans des conditions
favorables à l’équilibre écologique, et d’autre part,
promouvoir des combustibles de substitution du bois de feu et au charbon
de bois tels, des briquettes de charbon minéral, des substituts
pétroliers comme le GPL, le kérosène et le fuel oil
dans les secteurs qui dépendent presqu’essentiellement du bois-énergie
comme combustible.
Parallèllement, la promotion de l’utilisation des ressources
énergétiques locales renouvelables telles l’énergie
solaire, l’énergie éolienne et l’énergie hydraulique
constituent des moyens pratiques de satisfaire des besoins pressants de
développement dans les régions rurales. Des mesures de politique
devraient aussi être envisagées en vue de faire la promotion
des techniques qui permettent d’en faciliter l’utilisation.
L’ articulation des différentes actions sus-mentionnées
ne peut être réalisée qu’à travers la mise en
place d’une politique énergétique nationale avec pour objectif
la gestion rationnelle du secteur énergétique dans son ensemble
en vue d’un développement harmonieux et durable.
BIBLIOGRAPHIE