Le projet Energie et Environnement de CARE-Haiti vise principalement la réduction de la consommation du bois et du charbon de bois comme combustibles utilisés par les ménages, les restaurants de rue, les boulangeries et les blanchisseries, par l’introduction et la vulgarisation d’équipements améliorés au bois et au charbon de bois, au kérosène, par la promotion de l’utilisation d’équipements à gaz. La protection de l’environnement est le but final de toutes les actions entreprises par le projet. Pour y parvenir, d’autres acteurs tels : l’Etat, les producteurs d’équipements, les commerçants et les utilisateurs, doivent être impliqués en jouant chacun leur rôle respectif dans le processus. C’est ce qui justifie l’implication des institutions financières dans de telles activités par l’octroi de crédits aux producteurs, aux commerçants et aux utilisateurs. Chacun de ces acteurs a besoin d’appui, et le manque de moyens financiers représente pour eux un obstacle de taille. Le producteur qui ne possède pas un capital suffisant ne peut pas acheter les matières premières, ne peut pas satisfaire à temps les demandes de sa clientèle. Le revendeur, pour sa part, ne peut pas constituer un stock important s’il ne bénéficie pas des avantages du crédit. Donc le commerçant ne bénéficie pas des avantages liés aux économies d’échelle et ne se trouve pas non plus en mesure de vendre à crédit aux utilisateurs. Ces derniers, s’ils désirent se procurer un équipement leur permettant de réduire leur consommation de bois ou de charbon de bois, ou tout simplement de passer de ces combustibles à d’autres combustibles de substitution, n’ont pas assez de moyens pour le faire. Le crédit est ainsi devenu un volet très important qui doit être pris en compte tant par le projet que par tout autre acteur concerné par les sérieux problèmes environnementaux que connaît le pays, et qui deviennent de plus en plus grave avec le temps. Le crédit vu par les institutions financières Plusieurs institutions financières de la place semblent être préoccupées par la dégradation de l’environnement et veulent pleinement jouer leur rôle en ce qui a trait au financement de la production et la commercialisation d’équipements qui peuvent amener à diminuer la pression exercée sur les ressources forestières du pays. Cependant, ces institutions financières, comme toutes autres institutions dignes de ce nom, poursuivent des objectifs de performance au niveau de leur portefeuille de crédit. Loin de nous l’idée qui porterait certains à croire que si une institution financière accorde des prêts qui contribueraient, même de manière indirecte, à faciliter la substitution du charbon de bois et du bois de feu, cela pourrait l’empêcher d’atteindre un niveau de performance acceptable. Ce serait, au contraire, un nouveau créneau qui permettrait à ces institutions d’augmenter le volume de leur portefeuille, l’éventail de leur clientèle et le nombre de nouveaux clients. Ce serait également un moyen pour celles-ci d’augmenter leurs impacts sociaux et contribuer ainsi à une amélioration des conditions de vie de la population. Il faut, toutefois, admettre que les institutions financières n’ont pas jusqu’à présent toutes les garanties nécessaires prouvant que le secteur des équipements améliorés ou de substitution ne comporte pas des risques élevés. En effet, peu d’expériences y ont été faites par les institutions financières haïtiennes, et la clientèle avec laquelle elles auront à faire face est nouvelle. Les risques sont surtout dus à la conjoncture socio-économique actuelle du pays. Quand un client fait une demande auprès d’une institution financière, l’un des facteurs pris en considération par celle-ci est la garantie que ce client compte offrir. Il existe actuellement en Haïti un grand marché potentiel pour les équipements améliorés et de substitution, mais jusqu’à présent la demande est un peu faible. Cette assertion vient du fait que les ménages et les petites entreprises utilisant le bois ou le charbon de bois sont conscients des dégâts causés par l’utilisation de ces combustibles sur l’environnement, mais sont jusqu’à présent réticents, pour des raisons que nous n’abordons pas dans ce présent article, quand il s’agit de changer d’équipements. Aussi, les institutions financières restent-elles dans l’attente d’une éventuelle évolution au niveau de la demande pour les équipements d’économie et de substitution d’énergie avant de se lancer totalement dans le financement de cette activité qui leur est tout à fait nouvelle. Stratégie envisagée par les institutions financières D’une part, les institutions financières ne veulent pas prendre les risques à elles seules. Elles croient que l’Etat devrait intervenir également en garantissant les crédits alloués au secteur des équipements énergétiques. D’autre part, elles font face à un manque de fonds leur permettant de satisfaire les nombreuses demandes venant de leurs clients. Plusieurs d’entre elles recourent parfois à d’autres institutions financières telles que banques de développement, bailleurs de fonds, Structures Financières Intermédiaires (SFI), entre autres, dans le but de trouver des fonds supplémentaires. Le financement à grande échelle du secteur énergétique étant jusqu’à présent au stade embryonnaire, de nouveaux fonds seraient également requis. Il faut toutefois souligner que certaines institutions ont fait des tentatives en faveur du financement du secteur énergétique, mais ces actions n’ont pas dépassé le stade embryonnaire. Conclusion Il est plus que jamais temps que les artisans producteurs, les revendeurs et les utilisateurs d’équipements améliorés et de substitution aient pleinement accès au crédit. Cette mesure aurait l’avantage de réduire la pression exercée sur les combustibles traditionnels, bois de feu et charbon de bois, qui représentent la plus grande source d’énergie en Haïti. Ce besoin s’accroît encore davantage avec le niveau de plus en plus élevé de déboisement en Haïti. Il faut noter que les utilisateurs (ménages et petites entreprises) sont conscients des torts causés par l’utilisation du bois et du charbon de bois sur l’environnement et sur leur propre vie. Ils seraient, pour la plupart soulagés d’utiliser d’autres équipements leur permettant de contribuer à la solution de ces problèmes. Le financement des producteurs pourrait compenser le problème de la disponibilité des équipements sur le marché. De plus, les institutions financières ont besoin d’un peu plus de confiance dans la solvabilité du secteur des équipements énergétiques. La création des fonds consacrés à l’environnement devraient permettre à ces institutions de crédit d’être mieux armé dans ce combat qui comporte des risques non négligeables. 1/ A. Boudinot/ J. C. Frabot, Techniques et pratiques bancaires, éd. Sirey, 1978, P. 239
|